Voici quelques semaines, un petit glaçon est né. Très vite, il, s’est engourdi, endormi, blotti dans le froid du congélateur bien garni. Entre le rôti, les cannelloni, le frichti et le tutti frutti, il dort d’un sommeil sans rêve, sans vie.
Tout à coup, la porte s’ouvre, une main se saisit de lui, de lui et de ses voisins de survie, bien rangés, bien disposés, sans un pli.
Horreur ! L’air devient plus chaud et finit de le réveiller. Très vite, il se retrouve la tête en bas et sent dans sur ses omoplates, la morsure de l’eau chaude. Elle lui fait froid dans le dos !
Il ne veut pas mourir, se fondre à jamais, perdre son identité, celle d’un petit glaçon qui a vu le jour dans la troisième case de la deuxième rangée. Il s’agrippe de toute la force de son froid, de ses cristaux aux parois de plastique.
Il se cramponne, résiste alors qu’autour de lui, ses frères de froidure tombent lamentablement…au fond d’un bol même pas beau ! Et il n’y a rien de plus lamentable qu’un glaçon qui chute dans un bol laid, c’est bien connu !
Il n’en peut plus le petit glaçon, il n’en peut plus et lui, le dernier, le glaçon de la troisième case de la deuxième rangée finit aussi par tomber dans un cri de terreur, un râle de douleur, un début d’agonie.
Mais là, bizarrement, rien ne se passe. Il se sent même comme…libéré ! Il peut s’étaler, se laisser aller, discuter, toucher et se fondre avec les autres.
Alors, le petit glaçon se sent enfin exister pleinement et tout simplement en redevenant ce qu’il a toujours été : gouttes d’eau !
Et pourtant, un petit glaçon vient de mourir, là, tout bêtement aujourd’hui !
Une vie de glaçon
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